Dominique Potier : « Remettre les commerciaux dans le jeu, avec des CEPP »
Le rapporteur de la commission d’enquête parlementaire sur l’échec des plans Ecophyto a répondu aux questions d’Agrodistribution sur l’avenir de la séparation conseil et vente pour les produits phytosanitaires. Pour Dominique Potier, le conseil spécifique doit être réautorisé aux vendeurs.
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Agrodistribution : Quel bilan dressez-vous de la séparation dans le rapport ?
Dominique Potier : On reprend les conclusions de la mission flash [sur la séparation, présentée mi-juillet, ndlr] en plus détaillé. La mesure est un échec. D’une part, la séparation a créé de l’insécurité juridique. Elle a aussi dévitalisé le dispositif des CEPP, un processus pourtant assez original qui était en train d’émerger. Dans celui-ci, les entreprises initient des solutions, qui sont étudiées et reconnues par l’État. Le troisième élément, c’est l’invention en parallèle du conseil stratégique [phytosanitaire, ndlr], obligatoire à raison de deux fois tous les cinq ans. Seulement 20 % des agriculteurs ont fait cette demi-journée. Le conseil agricole est le grand impensé. La recherche a progressé mais elle n’a pas été jusqu’au monde paysan. Il y a eu un échec du continuum.
Que proposez-vous pour la suite ?
D. P. : Deux choses. D’abord, on remet dans le jeu les commerciaux, avec des CEPP.
C’est-à-dire un retour du conseil spécifique aux vendeurs ?
D. P. : Oui. Et en parallèle, on finance un conseil agronomique universel annuel et global, qui ne porte pas que sur les produits phytosanitaires mais sur l’ensemble. Il serait confié aux chambres d’agriculture, elles en seraient redevables. Nous avons estimé le budget nécessaire à 70 M€ par an, plus largement dans une fourchette de 50 M€ à 100 M€ par an. Nous voudrions développer les phytiatres [définis dans le rapport comme des « experts en biologie végétale chargés de diagnostiquer et traiter les maladies du végétal », ndlr], avec un ordre pour éviter des problèmes déontologiques. Un lieu où se côtoient culture commerciale et consulaire, pour créer un écosystème. Le travail en silo n’est pas bon.
Donc un conseiller de coopérative ou de négoce pourrait être phytiatre ?
D. P. : Oui.
Quid des CEPP ?
D. P. : Déjà, se pose la question de l’indicateur. Ce serait bien d’avoir une boussole commune, comme l’indicateur européen, le HRI, qui couple quantité de substance active et toxicité. Le HRI traduit bien le succès en France de la baisse des CMR [produits classés cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques, ndlr]. Les CEPP sont porteurs d’une promesse qu’on a un peu tuée dans l’œuf.
L’idée est de durcir les sanctions actuelles ? En revenant par exemple à 11 € par Nodu manquant, comme prévu au départ ?
D. P. : L’idée serait plutôt une sanction incitative à la réussite.
Qui serait liée au pourcentage de non-atteinte de l’objectif ?
D. P. : Oui.
La séparation est une promesse de campagne d’Emmanuel Macron. Peut-il réellement y avoir un retour sur le sujet ?
D. P. : Quand tous les acteurs publics et privés disent la même chose, c’est une fausse bonne idée. On a le droit de se tromper, et de corriger. La faute n’est pas d’avoir essayé, c’est de ne pas corriger.
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